Ne soyez pas surpris par ce titre quelque peu provocateur… Vous n’imaginez pas à quel point il est difficile dans notre métier de faire comprendre nos tarifs à nos clients et d’obtenir une juste rémunération pour notre travail.
« Public » ne signifie pas « gratuit »…
Dans « écrivain public », « public » signifie que l’écrivain rédige des documents pour le grand public, pas qu’il le fait de manière bénévole. Il s’agit d’un métier, pas d’un hobby. Un métier qui demande de sérieuses compétences rédactionnelles et relationnelles, entre autres.
L’écrivain public est un prestataire de services, comme l’est un coiffeur, par exemple, avec qui il ne viendrait à l’idée de personne d’essayer de marchander.
La différence, pour le client, c’est qu’il peut se rendre compte facilement de l’expertise d’un coiffeur : il sait qu’à moins de choisir de se raser la tête systématiquement, il ne pourra pas se couper lui-même les cheveux, qu’il n’en a pas le savoir-faire.
Alors voilà, comme a priori tout le monde ou presque a appris à écrire, quelle peut donc bien être la valeur ajoutée d’un professionnel de l’écriture ? Voilà généralement la première source de nombreuses incompréhensions tarifaires…
Des prestations sur mesure
« Ah mais ne vous inquiétez pas, ça ne vous prendra pas longtemps ! » Si vous saviez combien de fois j’ai entendu cette petite phrase… C’est la raison pour laquelle à l’issue d’un travail, j’indique toujours en complément de ma facture le nombre d’heures réellement passées sur la prestation demandée. Quelle surprise de recevoir alors un mail d’un client qui rechignait à payer et qui se confond tout à coup en remerciements…
Et n’oublions pas les nombreuses heures de travail peu ou non facturées, lorsque nous rédigeons des devis ou répondons aux messages ou aux coups de téléphones de personnes en quête d’informations, sans compter les recherches nécessaires à la rédaction ou la correction d’un document, les échanges avec les clients, les changements parfois importants à effectuer sur un document fini, etc.
Non, aucun écrivain public ne fera jamais fortune ! J’en connais plutôt qui, bien que passionnés et ne comptant pas leurs heures de travail, ont au bout du compte bien du mal à vivre de leur activité. Il leur faut souvent cumuler plusieurs emplois ou compter essentiellement sur l’apport financier de leur conjoint pour vivre et faire vivre leur famille. Beaucoup abandonnent, faute de revenus suffisants…
Différence entre facturation et rémunération
Cela paraît sans doute évident à certains, mais pas à tout le monde, je vous le garantis : ce que l’écrivain public facture ne correspond pas à ce qu’il va toucher au bout du compte ! Pour ce qui est des charges, il convient de déduire entre 25 et 50 % du montant facturé. Vous pouvez faire un rapide calcul sur la base d’une lettre facturée 30 euros… Sans compter le budget de fonctionnement, variable selon la situation, et d’une année à l’autre aussi (achat de matériel, logiciels, formations, etc.).
L’écrivain public est à la tête d’une entreprise, certes petite, mais source de nombreux frais.
Gratuité rime rarement avec qualité
Oui, nous l’entendons souvent : « Mais j’ai trouvé bien moins cher ailleurs ! », voire gratuit… Et encore, quand on prend la peine de répondre à nos envois de devis… Alors c’est vrai, je l’avoue, je continue à passer du temps à expliquer, inlassablement, pourquoi payer « moins cher » n’est pas toujours une bonne affaire.
Il faut dire qu’Internet semble déjà proposer tout ce dont tout le monde a besoin, puisqu’il fourmille de modèles de lettres gratuits, de discours formatés, d’articles prémâchés. Se pose alors la question de savoir si l’on veut un service « discount » ou un travail unique et de qualité.
Attention, loin de moi l’idée de chercher à vous apitoyer. Nous aimons notre métier et nos missions, passionnément. Nous souhaiterions seulement pouvoir en vivre décemment. Tout simplement. N’hésitez pas à demander un complément d’information à votre écrivain public, qui se fera un plaisir d’expliciter ses tarifs !
Pour aller plus loin : Gilles Salomon, Plaidoyer pour un métier qui se meurt : écrivain public http://www.huffingtonpost.fr/gilles-salomon/ecrivain-public-metier-meurt-playdoyer_b_8244416.html
Extrait : 65% des écrivains publics déclarent un revenu annuel inférieur à… 5000 euros ! Pour être complet, 4% d’entre nous disposent d’un revenu annuel supérieur à 12.000 euros et 8% supérieur à 25.000 euros.
Cette profession, dont seuls 10% de ses membres parviennent (le plus souvent après plus de 3 ans d’activité) à « toucher le graal » – j’ai cité le SMIC net -, est à 75%, féminisée car, selon une de mes consœurs: « Je travaille pour un statut. Pour les revenus, je suis mariée… »